Mon roman a été revu dans son ensemble une deuxième fois. Cette fois c’est une équipe de 3 personnes qui ont passé mon livre au crible. L’objectif étant de repérer les fautes (orthographe, grammaire, conjugaison) qui seraient passées à travers les premières relectures. Mais aussi de chercher d’éventuels problèmes de fond, et de reformuler les passages trop alambiqués. Tout cela dans le but de sortir une troisième épreuve (actuellement en cours de livraison).
Je vous rassure aucun problème de fond, c’est à dire, d’incohérence scénaristique, n’a encore pu être retrouvé par mes lecteurs. Ce qui est un signal très positif qui met en lumière le rôle prépondérant que mes notes et la construction du plan ont pu jouer au cours de la rédaction de l’histoire. C’est le point que je vais aborder aujourd’hui.
En effet, beaucoup de personnes de mon entourage m’ont posé cette même question:
« Comment as-tu fait pour pondre un livre de 500 pages ? »
Je vais donc sortir un temps du domaine scientifique, habituellement présent dans mes articles, pour vous expliquer comment, moi, qui n’ai aucune expérience dans le domaine littéraire, je suis parvenu à écrire un livre en deux ans.
Attention ! La méthode que je vais décrire ici n’est pas universelle, je n’ai pas cette prétention. Chaque auteur doit, très certainement, aborder les choses d’un angle différent. Mais je pense qu’il n’est pas de bonnes histoires sans un minimum de rigueur et de méthode dans son élaboration.
Bien savoir où l’on va
La première chose que j’ai écrite, avant même de noircir la première ligne de la première page, fut un résumé succinct (environ deux pages) de mon histoire. De là, j’ai pu ensuite formuler un plan global et structurer mon récit.
Tout au long de l’écriture j’ai créé et maintenu, en parallèle du fichier contenant l’histoire, 4 autres fichiers.
Les notes de l’auteur
Le premier contient les différentes notes d’ordre technique comme, par exemple, le fonctionnement du propulseur spatial Hathor, ou encore la façon dont fonctionnent certaines des armes utilisées dans l’histoire. Bref, tout ce que j’ai pu trouver ou imaginer et dont je voulais garder une trace détaillée et facile à retrouver.
Sans cela, il aurait fallut que je me rafraichisse la mémoire en retrouvant les différents passages où je les avait évoqué préalablement. De plus, cela me permettait d’imaginer ou de documenter de façon très précise des technologies ou des objets pour éviter des incohérences, si ceux-ci étaient abordés plusieurs fois dans le récit.
Plus concrètement, j’ai créé l’univers de mon histoire avant d’écrire cette dernière. Bien-sûr, tout cela à évolué au cours de l’écriture. Le fait de le consigner ou de l’esquisser dès le départ n’oblige pas forcément à le graver dans le marbre. Il faudra toutefois être rigoureux à chaque changement apporté afin qu’ils n’aient pas de conséquences sur les chapitres déjà écrits.
Par exemple, vous inventez un appareil volant futuriste qui va transporter votre héros d’un point A vers un point B à une certaine vitesse et dont vous allez parler à la page 85.
Plus tard, vous y faites à nouveau référence et souhaitez l’utiliser pour effectuer un autre trajet. Mais vous êtes à la page 362 ! Comment rester cohérent si vous ne vous souvenez plus de la vitesse à laquelle vous l’aviez fait évoluer la première fois ?
Vous voulez que votre récit soit cohérent, vous ne pouvez donc pas faire voler un même appareil à des vitesses totalement différentes à deux endroits éloignés de l’histoire. Ça ne tiendrait pas debout. Bien-sûr, vous ne vous rappelez plus exactement à quel endroit vous en aviez déjà parlé… Devez-vous rechercher ce passage et le décortiquer pour en déduire les informations auxquelles vous aviez pourtant déjà réfléchi une fois ? Non, ce serait une grosse perte de temps et un gros risque d’erreur. Il faut le consigner dès le départ dans un fichier séparé avec tous les détails liés à sa conception (vitesse, couleur, capacité de transport, armement, etc…). De cette façon, un saut rapide dans ce fichier vous donnera toutes les informations dont vous avez besoin pour l’intégrer à nouveau. Et cela, sans risquer de glisser une incohérence dans l’histoire.
La frise chronologique, ou Timeline
Même si l’histoire ne couvre qu’une courte période temporelle, l’intégrité du récit reposera beaucoup sur son respect chronologique des faits. Surtout si vous partez sur une histoire où les sauts dans le temps (flashbacks ou flashforwards) seront nombreux. Il est certain de perdre son lecteur si l’on ne maîtrise pas parfaitement cet aspect. Il suffit d’une petite erreur que vous ne relèverez pas, car vous connaissez parfaitement l’histoire, pour semer la confusion dans l’esprit du lecteur qui, lui, la découvre.
Par « frise chronologique » je ne parle pas forcément d’une belle flèche parsemée de petites annotations à la façon des livres d’histoire. Une simple liste, ou un tableau peut largement faire l’affaire. C’est une question de ressenti personnel, choisissez le format que vous aurez le moins de difficultés à déchiffrer.
Tout ce qui figurera sur cette frise ne doit pas forcément figurer dans l’histoire. Il est possible que certains éléments soient évoqués sur la frise uniquement dans le but d’aider l’auteur dans la construction de sa trame.
Personnellement j’ai choisi d’utiliser une simple liste, en utilisant les années comme sous-titres. J’ai inscris, sur chaque date clé, les événements qui en découlaient et, parfois, les protagonistes impliqués. Cela m’a permis d’éviter les incohérences à ce niveau. D’autant plus que mon histoire se déroule sur une trame temporelle assez longue.
Notez que cet outil peut parfaitement faire partie de votre fichier contenant les notes de l’auteur. Il servira lui-aussi de référence tout au long de l’écriture. Et vous verrez rapidement que cet outil est utile lorsque vous débuterez l’écriture.
La liste des personnages
Le troisième fichier contient une liste de tous les personnages. Qu’ils n’interviennent que très peu, ou qu’ils soient centraux, il y sont tous. Évidemment, on s’abstiendra d’y faire figurer les passants, ou les « figurants », ou encore le serveur qui n’a fait qu’apporter un café à la page 36. Je parle bien, ici, des personnages qui interviennent dans l’histoire ou qui captent un minimum d’attention au lecteur.
Ici encore, il va falloir être précis. Nom, prénom, date de naissance (ou du moins année), rôle au sein de l’histoire, profession, caractère, et même biographie lorsqu’il s’agit d’un personnage important ou qui va évoluer au cours du récit. Autant d’informations qui rendront vos personnages plus crédibles et éviteront des erreurs caractéristiques. Leur insertion dans votre timeline sera d’autant plus aisée en disposant de leurs dates de naissance, et donc, de leur age.
Comment se rappeler si le colonel Bidule, était déjà colonel à un moment où son passé serait évoqué ? Un coup d’œil sur sa biographie, puis sur la timeline donnera la réponse immédiatement et de façon totalement fiable à cette question.
L’erreur type est celle du personnage « fil rouge », présent tout au long de l’histoire mais qui ne semble jamais vieillir. Capable d’échapper à une course poursuite à pieds à la page 33 comme à la page 422 qui, pourtant, se trouve 30 ans plus loin dans l’histoire. Ou encore celui qui change de prénom en cours de route, qui change de langue, qui devient subitement fumeur, ou enfin, dont le caractère se retrouve aux antipodes de celui de sa première apparition.
Il existe bien d’autres façons de créer un personnage bancal, mais sa cohérence tout au long de l’histoire est primordiale.
Pour un auteur, il est facile de se faire berner par ce type d’erreur. Connaissant parfaitement le déroulement de l’histoire, on ne va pas se focaliser sur des personnages que l’on sait sans véritable influence sur celle-ci. Le lecteur, en revanche, découvre l’histoire et ne sait pas encore si tel ou tel personnage va devenir important. Il aura donc tendance à mieux mémoriser ce genre de détail, et à se retrouver perdu par une erreur de ce type.
Les annexes
Enfin, lorsque l’on invente une histoire, que l’on créé un univers, il y a beaucoup de choses qui sont le fruit de notre imagination et qui n’existent pas forcement dans la réalité. Afin de pouvoir décrire correctement des événements, un décor, une bataille, etc… Il conviendra d’avoir une idée précise de la situation. Et, d’après moi, pour cela, il n’y a rien de tel qu’un dessin ou un schéma.
N’hésitez pas à jouer l’apprenti dessinateur ou infographiste, ces supports n’auront pas vocation a être publiés et vous serez les seuls à les consulter. Alors même si le résultat est franchement moche, peu importe ! Le but n’est pas que ce soit beau et que cela figure dans le livre final, mais uniquement que cela vous aide dans votre écriture, dans vos descriptions et même dans votre esprit, afin d’imaginer la situation avec plus de précision.
Par exemple, lors de l’écriture de mon livre, j’ai dû décrire un lieu qui n’existe pas en réalité. Un lieu que j’ai créé de toute pièce, mais qui est censé s’intégrer dans la géographie existante. Pour que cela soit réaliste, et que je puisse m’y retrouver lorsque j’y plaçais mes pions, j’ai utilisé un outil particulier: Google Maps !
J’ai fait plusieurs captures d’écran de la zone en question, noté sa géographie, sa végétation, son relief. Puis j’y ai intégré, à l’aide d’un outil de retouche gratuit, mon lieu fictif. J’ai alors pu utiliser l’échelle de l’image d’origine pour donner une taille, une altitude et un relief à mon lieu imaginaire.
De cette manière, j’ai pu décrire le paysage, la façon et le temps mis par mes protagonistes pour l’arpenter, et donner une localisation spatiale précise à mes lecteurs afin qu’ils puissent s’y retrouver.
Les choses que l’on peut trouver dans mes annexes sont: Un organigramme représentant l’organisation politique de plusieurs des nations de mon histoire, les plans et dimensions de plusieurs appareils (aussi bien terrestres que spatiaux), la définition de certains termes, de nombreuses cartes géographiques réelles ou imaginaires, etc…
Mais laisser une place à l’imprévu
Bien-sûr, tout n’a pas été écrit et prévu lorsque j’ai commencé mon histoire. Il est souvent arrivé qu’un élément nouveau fasse son chemin dans mon cerveau pour que, finalement, je l’intègre dans le récit. Son origine pouvant être aussi bien de l’inspiration pure, qu’un élément pioché dans l’actualité du moment. Et pour permettre l’intégration d’éléments importants, il faut que le plan garde une certaine flexibilité.
Je suis donc allé loin dans le détail pour tout ce qui avait trait à l’univers dans lequel évoluent mes personnages, mais je suis resté plus flou dans le plan global du récit. D’ailleurs, si l’un de mes lecteur consultait aujourd’hui la toute première version de mon plan, il serait très surpris par la tournure qu’a pris l’histoire dans les versions finales.
Il arrive également qu’un croisement de personnage se fasse de façon totalement imprévue. Ajoutant un réalisme supplémentaire à l’histoire, puisque l’événement est réellement fortuit. Reste à l’auteur à le percevoir et à l’utiliser correctement.
Je ne crois pas que les histoires, pourtant extrêmement compliquées, de certaines fictions aient pu être « prévues » dans leur intégralité. Certes, la majorité des éléments clés le doivent, si l’on veut savoir où l’on va justement. Mais il est une multitude de petits détails, de petits événements qui viennent en renforcer le réalisme et la complexité de façon naturelle et qui sont le fruit de l’imagination, de l’inspiration et des idées du moment.
La relecture
C’est une étape des plus importantes. J’ai malheureusement beaucoup sous estimé la quantité de travail qu’elle impliquait, et je fus pris au dépourvu par les délais imposés.
J’ai apposé le point final de mon roman au mois de novembre 2014. Nous sommes à présent en avril 2015, et ce travail n’est pas encore terminé (même s’il touche au but).
Evitez les fautes dès le début
Aspect que j’ai totalement éludé lors de l’écriture des 10 premiers chapitres, me disant que je verrais ça plus tard. Je l’ai payé chèrement.
J’ai eu la présence d’esprit de faire commencer la première relecture lorsque j’avais atteint la moitié de l’histoire. Les retours immédiats que j’ai obtenu m’ont incités à être plus rigoureux dans l’écriture de la suite. Et heureusement pour moi !
L’image de l’écrivain, tapant des lignes sur son ordinateur avec un Bescherelle et un dictionnaire papier posé sur la table, n’est pas un cliché. J’irais même jusqu’à dire maintenant que c’est indispensable. Et c’est une erreur que je ne referai pas.
Attention à la mise en page ! (auto-édition)
Cette partie s’adresse surtout aux auteurs ayant pour objectif une auto-édition. Si un texte est facilement malléable sur un logiciel tel que Microsoft Word, il le devient nettement moins lorsqu’il est question de 470 pages. Aussi il faut, dès le départ, prévoir les changements de style et de mise en page.
Les styles
C’est un outil à utiliser absolument. Il est possible, dans la plupart des logiciels de traitement de texte, de définir des styles et de les nommer. Cela permet d’affecter certaines parties du texte à un style bien précis.
Pourquoi ? Afin de pouvoir sélectionner ces parties directement, où de les modifier plus tard sans avoir à faire une relecture complète.
Exemple, vous avez terminé l’écriture de vos 400 pages et vous vous rendez compte que l’indentation de vos tirets de dialogue est trop importante. Si vous avez pris le soin d’affecter le style « dialogue » à la totalité des dialogues de votre fichier, il vous suffira d’aller modifier cette indentation au niveau du style pour que l’ensemble des dialogues du livre soient modifiés instantanément. Si vous ne l’aviez pas fait… eh bien vous êtes bon pour reprendre les 400 pages dans leur intégralité et modifier cette indentation à la main. Il en va de même pour toute autre propriété du texte.
Autre exemple, vous désirez faire figurer le nom du chapitre sur l’entête de vos pages ? Si vous avez utilisé les styles, rien de plus facile en utilisant un champ de référence. Le logiciel mettra à jour automatiquement vos entêtes avec le dernier texte écrit avec ce style. Si vous ne l’avez pas fait, eh bien vous devrez composer avec les sections de document. Ce qui sera bien plus long et fastidieux.
La typographie
C’est un autre détail énervant lorsque l’on arrange soi-même sa mise en page. Quoi de plus embêtant, par exemple, qu’un point d’interrogation qui se retrouve seul à un retour de ligne ?
Il y a une façon de gérer cela en utilisant des raccourcis claviers bien utiles. Dans l’exemple précédent, nous utiliserons les espaces insécables. Ils sont disponibles sous Word en utilisant la combinaison de touches : Ctrl + Maj + Espace. Cela aura pour effet d’empêcher le logiciel de couper cet espace par un retour chariot.
Il est possible de faire de même avec un paragraphe que l’on souhaiterait garder uni et compact sur une même page. Pour cela il existe le saut de ligne (Maj + Entrée) qui empêche le logiciel de couper le paragraphe sur deux pages.
Toutes ces petites astuces ne sont pas à prendre à la légère et pourront vous faire gagner des jours de travail lors de vos relectures. Sans ces petites erreurs, vous pourrez vous concentrer sur des choses plus importantes et risquerez moins de donner une mauvaise image de vos compétences à une éventuelle maison d’édition.